Lunch, Conférence : "La crise politique belge. Le fédéralisme belge: quo vadis ?"

Dienstag, 8. April 2008 12:15, -
Referenten/innen: MM. Tom Nijs et Stefaan Ghesquiere
Les événements politiques récents qui ont secoué la Belgique ne se comprennent qu'à la lumière de l'histoire de ces 5 dernières décennies entre les Flamands et les Wallons. Le processus de fédéralisation de la Belgique, mis en route dans les années soixante, était mû avant tout par des problèmes linguistiques, mais aussi par un désir des Flamands d'accorder aux régions davantage de compétences en matières culturelles et personnelles, s'opposant par-là aux francophones.
(Note du rédacteur: la présentation de ces deux étudiants reflète manifestement le point de vue des Flamands. On notera par ailleurs que l'évolution décrite, semble-t-il inéluctable, va dans le sens des attentes des Flamands. Elle est une succession de réformes d'état).
La crainte des francophones de voir le bilinguisme s'instaurer a poussé à la création en 1962 de deux régions monolingues, la région flamande et la région flamande, Bruxelles demeurant bilingue. La présence d'une majorité francophone au sein de 6 communes flamandes, puis la création d'un arrondissement électoral bilingue, ont été les germes de problèmes à venir.
En 1970, sont créées les communautés des cultures flamande, francophone et allemande, qui se juxtaposent aux régions. Elles sont dotées de conseils législatifs compétents au plan culturel et personnel, qui sont en fait des groupes linguistiques formés au sein du parlement fédéral.
En 1980, les questions socio-économiques deviennent du ressort des régions flamande et wallonne.
En 1988, les communautés acquièrent davantage de compétences pour inclure entre autres l'éducation. En même temps est créée la région Bruxelles-Capitale. La Belgique comprend dès lors trois régions (flamande, wallonne et bruxelloise) et trois communautés (flamande, francophone et germanophone).
La fédéralisation de la Belgique est formalisée en 1993, les entités fédérales élisant directement leurs propres représentants. Sous la pression des Flamands, on donne encore plus de compétences aux régions et aux communautés. De même en 2003, qui voit alors la cinquième réforme de l'état.
La Belgique – Un état fédéral:

Pour les francophones, le spectre d'autres transferts de compétences aux régions linguistiques fait craindre le pire, qui peut être la fin de la Belgique. La méfiance règne, tant entre les gens, qu'entre les partis et entre les communautés. Le problème de B-H-V (Brussel/Bruxelles-Halle-Vilvoorde) envenime cette situation, il n'est pas discuté de manière rationnelle. Globalement, il s'agit de ceci: Bruxelles est à 80% francophone, mais elle est en terre flamande, et beaucoup de francophones ont quitté la ville pour s'établir dans les campagnes flamandes avoisinantes. Les tentatives des deux groupes linguistiques de préserver les intérêts de leurs ressortissants à Bruxelles et dans la Flandre voisine a abouti à la création de la circonscription électorale B-H-V, en violation de la constitution belge et créé une inégalité, et donc une discrimination à l'égard d'autres provinces qui connaissent des situations plus ou moins semblables.
Où en est-on aujourd'hui?
Après 282 jours de crise, la Belgique a un gouvernement dont les chances de survie paraissent minces parce qu'il y a dissensions en son sein sur les réformes d'état - insuffisantes pour les Flamands, trop extrêmes pour les Wallons - au niveau des partis politiques de la coalition et au sein de la presse et de l'opinion publique. La question B-H-V, trop délicate, a été mise provisoirement de côté.
Les grands partis nationaux n'existent plus, ils se sont scindés sur la barrière des langues. Résultat: chaque élu ne rend des comptes qu'à une partie de la population, flamande ou francophone. Les partis ont adapté leurs discours et leur programme en conséquence. Des partis extrémistes ont vu le jour, ils sont partie à la coalition.
Globalement, les partis francophones craignent que chaque nouvelle réforme de l'état ne rapproche la fin de la Belgique et celle de la solidarité nord-sud, importante pour le redressement économique de la Wallonie. Les partis flamands souhaitent encore plus d'autonomie, notamment en matières de santé, d'allocations familiales, d'allocations de chômage, de fiscalité des personnes morales et physiques et d'infrastructures ferroviaires. La prospérité de la Flandre en dépend, selon les conférenciers.
L'opinion publique, quant à elle, traduit l'aliénation des deux communautés:
- il y a de moins en moins de contact entre les deux communautés,
- de plus, chaque communauté n'entend que les opinions de sa communauté la plupart du temps,
- comme il n'y a plus des partis nationaux, chaque élu n'a de comptes à rendre qu'à une partie de la population et peut alors exprimer des opinions extrêmistes,
- la population des deux communautés, en général, ne s'informe que dans les médias de sa langue.
Comment les conférenciers voient-ils l'avenir?
Contrairement à ce que beaucoup de gens attendaient, la formation d'un gouvernement définitif a réussi. La fête de Pâques a donné un gouvernement à la Belgique. Il y a un accord au niveau d'une réforme de l'état et au niveau des affaires socio-économiques. Mais, cette solution respire la créativité belge pour trouver des compromis, en ce sens qu'on a formé une sorte de gouvernement définitif provisoire parce qu’il était impossible de trouver un accord complet au niveau d'une réforme de l'état. La solution trouvée est la suivante: déjà maintenant une petite réforme d'état sera effectuée et une grande réforme d'état devra être négociée avant le 15 juillet. Les partis flamands ont annoncé qu'ils quitteraient le gouvernement si cette réforme ne passait pas.
Comme un accord sur une réforme de l'état reste presque impossible, puisqu'il n'a pas été possible pendant les neuf derniers mois, tout dépendra de la réaction des partis flamands en cas d'échec.
De nouvelles élections devront très probablement avoir lieu, elles ne vont pas nécessairement améliorer la situation.
Point positif: les partis flamands et francophones sont aujourd'hui d'accord sur la nécessité d'une réforme d'état.
La probabilité que la Belgique se sépare est malgré tout faible aux yeux des conférenciers. Ils pensent qu'une Belgique confédérale sera la solution. De larges compétences seront données aux régions et aux communautés avec des critères de convergence au niveau fédéral.